En savoir plus : diagnostic différentiel et étiologique
Principe
Diagnostic différentiel
Le diagnostic différentiel de l'ostéoporose a pour objectif d'éliminer d'autres ostéopathies pouvant imiter l'ostéoporose. Selon les circonstances diagnostiques, il peut varier sensiblement :
- devant une DMO basse : on cherchera à éliminer les autres causes de déminéralisation diffuse ;
- devant une fracture par fragilité : on cherchera à éliminer les autres causes de fragilité osseuse locale ou diffuse ; ces ostéopathies fragilisantes ne sont pas forcément associées à une diminution de la DMO (par ex. maladie de Paget, métastases osseuses).
Les principaux diagnostics différentiels sont les affections malignes et les autres ostéopathies métaboliques.
- Les affections malignes (myélome, métastases osseuses, autres hémopathies) sont classiquement révélées par une fracture pathologique ou une ostéolyse dans un contexte de douleur d'horaire inflammatoire et d'altération de l'état général. Elles peuvent également être responsables d'une déminéralisation diffuse asymptomatique.
- Les ostéopathies métaboliques habituellement citées sont : ostéomalacie, hyperparathyroïdie primitive et ostéodystrophie rénale.
- La perte osseuse liée à la carence œstrogénique de la ménopause débute en période périménopausique et se poursuit pendant une dizaine d'année. L'atteinte prédomine sur l'os trabéculaire.[?] Elle peut être responsable de fractures précoces, survenant avant l'âge de 70 ans.
- La perte osseuse liée à l'âge concerne les deux sexes. Elle débute vers l'âge de 50 ans et s'accélérent à partir de l'âge de 75 ans. L'atteinte concerne l'os cortical[?] et l'os trabéculaire. Elle est classiquement responsable de fractures plus tardives, survenant après l'âge de 75 ans.
- Recherche d'une maladie cœliaque : Ac anti-endomysium et anti-transglutaminase de type Ig A (+ Ig A totales)
- Recherche d'un hypogonadisme :
- Testostérone, LH, FSH chez l'homme
- E2, FSH, LH (entre J2 et J4 du cycle sauf aménorrhée) chez la femme
- Recherche d'un hypercorticisme : cortisol libre urinaire des 24 heures (avec créatininurie des 24 heures) ± freinage rapide ou « minute » à la dexaméthasone (1 mg à minuit, dosage cortisol à 8 h)
- Recherche d'une hémochromatose : ferritine, coefficient de saturation de la transferrine
- Recherche d'une hépatopathie : AST, ALT, Gamma-GT, phosphatases alcalines, bilirubine
- Calcémie
- Parathormone
- Calciurie des 24 heures
- TSH
- Calcémie
- Albuminémie
- Créatininémie
- 25OH vitamine D
- TSH
- Electrophorèses des protéines plasmatiques et urinaires
- Testostérone chez l'homme
- Calcémie
- Albuminémie
- Créatininémie
- Phosphatémie
- Phosphatases alcalines
- TSH
- NFS plaquettes
- VS ou CRP
- Transaminases
- Calcémie corrigée par l'albuminémie
- Créatininémie
- Phosphatases alcalines
- 25OH vitamine D (après supplémentation)
- TSH
- NFS plaquettes
- Électrophorèse des protéines sériques (en cas de fract. vertébrale)
- Calcémie
- Phosphatémie
- Protidémie
- Albuminémie
- Créatininémie
- Ionogramme sanguin
- Phosphatases alcalines
- 25OH vitamine D
- Calciurie, créatininurie et natriurie des 24 heures
- NFS plaquettes
- Transaminases
- Calcémie
- Phosphatémie
- Créatinémie
- Phosphatases alcalines osseuses
- Calciurie des 24 h
- NFS
- VS
- Electrophorèse des protides plasmatiques
- Transaminases
- Ferritine, coefficient de saturation de la transferrine
- Testostérone totale et biodisponible
- Calcémie
- Phosphatémie
- Phosphatases alcalines
- 25OH vitamine D
- Calciurie des 24 h (avec créatininurie et natriurie)
- NFS plaquette
- Bilan hépatique
- Testostérone totale
Diagnostic étiologique
Le diagnostic étiologique a pour objectif de rechercher des causes secondaires ou facteurs aggravants.
En raison des implications diagnostiques et thérapeutiques, on distingue habituellement ostéoporose primitive (ou commune) et ostéoporoses secondaires.
Les facteurs étiologiques de l'ostéoporose primitive sont la carence œstrogénique de la ménopause et l'âge. Une carence en vitamine D est fréquemment associée chez le sujet âgé. Il existe également des formes idiopathiques.
Les ostéoporoses secondaires sont définies par la présence d'au moins une cause spécifique, c'est-à-dire autre que la ménopause ou l'âge.
Elles représentent 30 à 60 % des ostéoporoses de l'homme et plus de 50 % des ostéoporoses de la femme en périménopause. Les causes les plus fréquentes sont la corticothérapie systémique prolongée et l'hypogonadisme. Les ostéoporoses secondaires sont moins fréquentes chez la femme ménopausée.*
Examens biologiques
En plus de l'évaluation clinique, il est recommandé de pratiquer de façon systématique certains examens biologiques en cas d'ostéoporose, avec ou sans fracture par fragilité.
Quels examens réaliser ?
Il n'y a pas de consensus sur le choix de ces examens, y compris dans le cadre de l'ostéoporose postménopausique. Des examens recommandés de façon systématique en cas d'ostéoporose par certains auteurs, ne seront recommandés par d'autres qu'en seconde intention, en cas d'anomalie du bilan initial, ou en première intention mais uniquement en cas de fracture ou de terrain non typiquement la cible de l'ostéoporose primitive (femme non ménopausée, homme).
Plusieurs études ont tenté de définir la stratégie diagnostique ayant le meilleur rapport coût-efficacité et certaines sociétés savantes ont émis des recommandations. Ces éléments sont présentés dans le tableau 3 en bas de page.
Certains examens biologiques proposés peuvent avoir un intérêt pré-thérapeutique, en plus de participer au diagnostic différentiel et étiologique : supplémentation d'un déficit vitaminique D, recherche de contre-indications aux traitements anti-ostéoporotiques (insuffisance rénale, anomalie de la calcémie, etc.).
Ce bilan systématique doit être plus exhaustif chez la femme non ménopausée et chez l'homme (notamment avant l'âge de 70 ans). Il ne s'agit pas des populations habituellement concernées par l'ostéoporose primitive et les causes secondaires y sont plus fréquentes que chez la femme ménopausée. Dans ces populations, l'enquête diagnostique semble d'autant plus utile, en l'absence de fracture par fragilité, que la valeur de la DMO est inférieure à la normale pour l'âge, c'est-à-dire que le Z-score est inférieur à - 2.
Examens biologiques systématiques en cas d'ostéoporose chez la femme non ménopausée et chez l'homme |
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Tous les examens cités dans le cadre du diagnostic de l'ostéoporose post-ménopausique (cf. page précédente) Examens supplémentaires proposés |
Dans tous les cas, la présence d'anomalies cliniques ou d'anomalies du bilan biologique prescrit en première intention, doit conduire à la prescription d'examens appropriés. Par exemple, un dosage de la TSH doit être prescrit chez les patients ayant un traitement de substitution à visée thyroïdienne ou des signes cliniques de thyrotoxicose, une anomalie de la calcémie doit conduire à la prescription d'un bilan phospho-calcique complet avec notamment parathormone et calciurie des 24 heures, une sérologie de la maladie cœliaque doit être prescrite en cas de troubles digestifs chroniques et/ou d'anémie.
Aide à l'interprétation des résultats
Vous trouverez dans le tableau 2 ci-dessous les résultats habituels des examens biologiques en fonction des principaux diagnostics différentiels de l'ostéoporose primitive.
Ostéoporose primitive | Myélome multiple des os | Métastase osseuse | Hyperparathyroïdie primitive | Ostéomalacie | Ostéodystrophie rénale | |
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Hémogramme | N | anémie autre cytopénie |
hyperleucocytose | N | parfois anémie | anémie |
Vitesse de sédimentation | N | N ou ⇑ | N ou ⇑ | N | N | N |
C-reactive protein | N | N ou ⇑ | N ou ⇑ | N | N | N |
Électrophorèse des prot. plasmatiques | N | pic monoclonal hypogammaglob. |
N | N | N | N |
Créatininémie | N | N ou ⇑ | N | N | N | ⇑⇑ |
Calcémie | N | parfois ⇑ | parfois ⇑⇑ | N ou ⇑ | ⇓ | ⇓ |
Phosphatémie | N | N ou ⇑ | variable | N ou ⇓ | N ou ⇓ | ⇑ |
Phosphatases alc. | N ou ⇑1 | N | N ou ⇑ | N ou ⇑ | ⇑ | N ou ⇑ |
Calciurie des 24 h | N | N ou ⇑ | N ou ⇑ | ⇑ | ⇓ | variable |
Parathormone | N | N ou ⇓ | N ou ⇓ | ⇑⇑ parfois N |
⇑ | ⇑ |
25OH vitamine D | N ou ⇓2 | N | N | N | souvent ⇓⇓ | N |
Référence | Population cible | Bilan minimal proposé |
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Tannenbaum et al. 2002* | Ostéoporose chez des femmes de plus de 45 ans, en péri-ménopause ou ménopause. |
|
Jamal et al. 2005* | Femmes ménopausées en bonne santé avec T-score ≤ -2,5 et/ou fracture par fragilité. |
Pas de différence significative pour : calcémie, phosphatémie, parathormone, créatininémie, phosphatases alcalines, AST, ALT, NFS plaquettes. Non testés : 25OH vitamine D, électrophorèse des protides plasmatiques, sérologie de la maladie cœliaque, examens urinaires. |
Bours et al. 2011* | Hommes et femmes âgés de plus de 50 ans, avec fracture. |
Éventuellement, mais non testés : prélèvement urinaire des 24h, sérologie de maladie cœliaque. |
NOGG 2009* | Ostéoporose chez la femme ménopausée et l'homme de plus de 50 ans. |
|
SOC 2010* | Ostéoporose chez la femme et l'homme de plus de 50 ans. |
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AACE 2010* | Ostéoporose chez la femme ménopausée. |
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GRIO 2009* | Ostéoporose chez l'homme. |
|
Endocrine Society 2012* | Ostéoporose chez l'homme. |
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Abbréviations utilisées : AACE, American Association of Clinical Endocrinologists ; GRIO, Groupe de Recherche et d'Information sur les Ostéoporoses ; NOGG, National Osteoporosis Guideline Group (Royaume-Uni) ; SOC, Société de l'Ostéoporose du Canada.